Dans le royaume des loups,
Déjà depuis plusieurs mois,
La peste semait partout
Son
lot de peine et d’effroi.
Ces bêtes pourtant grégaires
Étaient passées solitaires,
Se méfiant de leurs semblables,
Agents
du mal incurable,
Qui
dévorait de ses feux
Les plus faibles et les plus vieux.
Les
malades gémissaient,
Les
cadavres s’entassaient.
Le Roi lança un appel
À tous ses sujets fidèles
Pour
piquer leur bienveillance.
Des pourparlers s’entamèrent
Avec les divers compères
En vue de peser le prix
De
leur généreux appui.
Citant leur docte savoir,
Les médecins, cela s’entend,
Obtinrent la grosse part
Sans
garantie d’engagement.
Clercs et officiers publics,
Brandissant leur sens éthique,
Mendièrent un boni de crise
Avant
qu’ils ne fraternisent.
Et même les croque-morts,
Plaidant leur sinistre sort,
Virent se gonfler leur bourse
Pour
leur funèbre ressource.
Les goussets bien mieux garnis,
Tous et toutes se vantèrent
Oui
! de leur philanthropie
Que les autres pauvres hères
Seraient forcés de payer
Pendant moult et moult années.
Que peut nous enseigner ce petit apologue ?
Que
pourrait en tirer un sage sociologue ?
Que
groupes d’intérêt sont meutes égoïstes
Qui
ne sont, à vrai dire, nullement altruistes.
Le
gout du bien commun leur semble un maléfice,
Leur
seule aspiration étant leur bénéfice.
Mais
ils ne doutent point de leur fraternité
Tout aveugles qu’ils sont de leurs infirmités,
Dont oser monnayer la générosité.