C'est en eux-mêmes que les signes religieux sont problématiques

Par: Annie-Ève Collin

Dans un texte de la Presse, Ronald Morris nous offre une fois encore une argumentation qu'on nous sert depuis qu'il est question d'interdire aux fonctionnaires de porter des signes religieux au travail : Morris plaide que ce n'est pas parce qu'une enseignante porte un signe religieux qu'elle agira par ailleurs de façon à convertir les élèves ou à mettre ses croyances de l'avant pendant ses cours. Inversement, ce n'est pas parce que quelqu'un ne porte pas de signe religieux qu'on a la garantie qu'il ne fera pas de prosélytisme autrement. Tout cela est certes vrai ; mais ça vise à côté du problème.


André Lamoureux, à qui Morris prétend répondre, l'avait pourtant établi de façon à la fois succincte et explicite dans son billet : "Ils [les signes religieux] sont des marqueurs et ont un effet idéologique direct, même sans paroles." Voilà. Ce n'est pas en tant que signes d'autre chose dans les façons d'agir éventuelles de l'enseignant - ou d'un autre fonctionnaire - que les signes religieux sont déplacés, mais en eux-mêmes. Il semble inconcevable que tant de gens en soient encore à demander des preuves que ce qu'on voit dans la vie quotidienne exerce une influence. Pourquoi pensez-vous que les entreprises ont des logos et paient des fortunes pour de la publicité visuelle?

L'intention de celle ou celui qui porte un signe ne change que peu de choses à l'impact que celui-ci aura sur ceux qui le voient. D'ailleurs, les codes vestimentaires comprennent rarement des prétentions sur les intentions des gens qui portent tel ou tel type de vêtement proscrit : les codes vestimentaires focalisent sur l'impact de l'habillement sur la sécurité des travailleurs ou sur l'image qu'il donne à ceux qui le voient.

Morris écrit avec raison que l'école n'est jamais neutre. En effet, Lamoureux écrivait : "C’est pour cela qu’il faut instituer une stricte neutralité de l’école. Pour éviter que celle-ci devienne un lieu de prosélytisme religieux ou politico-religieux où les enseignants affichent des valeurs non partagées ou potentiellement indésirables." Lamoureux aurait dû éviter l'usage du mot "neutralité", car en effet, rien de ce que font des êtres humains ne peut être neutre. 

Le problème avec les valeurs véhiculées par les signes religieux, n'est pas qu'elles ne sont pas neutres, mais qu'elle sont non partagées et potentiellement indésirables et surtout, surtout, inappropriées dans un contexte comme l'école, un contexte où on est censé favoriser l'apprentissage, le développement des connaissances, de la rigueur intellectuelle, de la culture scientifique.



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